Ne tombe jamais
Edité par Gallimard-Jeunesse. Paris , 2014
Au Cambodge, en 1975, Arn Chorn-Pond survit aux Khmers rouges, à l'âge de 11 ans, en jouant de la musique dans les champs. Aujourd'hui engagé dans l'action humanitaire, il lutte en faveur des droits de l'homme.
Avis des lecteurs
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Le cambodge au-delà de tout manichéisme
Le style interpelle d'emblée. Il s'affranchit de toute règle de syntaxe et de grammaire mais l'on comprend très vite le choix de Patricia McCormick de rester au plus près du témoignage -difficile et bouleversant- d'Arn Chorn-Pond. Arn a 11 ans lorsque survient le règne des Khmers rouges. Il raconte l'exil de la population, les camps de travail, les champs de la mort, les horreurs perpétrées par les cambodgiens entre eux, même envers les enfants (rappelons avec l'auteur que c'est près de 2 millions de personnes qui furent exterminées, soit un quart de la population). Le lecteur, comme le héros, doit maintenir une distance pour ne pas sombrer dans l'effroi : "Vous montrerez que ça vous touche, vous mourez. Vous montrez de la peur, vous mourez. Vous ne montrez rien, peut-être vous vivez." / "Si vous ressentez, vous devenez fou." Comme lui, il se rattache aux signes de solidarité, aussi rares que la méfiance était omniprésente. Qui est ami, qui est ennemi, après "quatre ans tuer, à combattre, à être affamé, à mourir", les frontières s'évaporent, au point qu'Arn deviendra Khmer lui aussi. Et puis Arn a la possibilité de partir aux États Unis, et c'est un autre combat qui s'annonce : "Après tout ce que j'ai supporté, maintenant, être sauvé c'est aussi quelque chose à quoi je dois survivre." Il faut comprendre les américains et leurs coutumes et surtout apprendre à chasser les visions d'horreurs, à chasser la haine des meurtriers de sa famille comme celle de lui-même. Après avoir survécu durant tant d'années, il lui faut désormais apprendre à vivre. Une vie qui n'aura de sens que dans le témoignage de l'histoire de son pays et la sauvegarde de la musique traditionnelle cambodgienne. Un incroyable récit de résilience.
par Julie Le 17 mars 2015 à 12:37